Adhan
« Carte postale » nous offre l’occasion de recevoir des nouvelles du monde en images et en sons. Brève et spontanée, elle se présente tantôt comme une question, tantôt comme une réponse, une impression qui invite à l’échange.
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“Postcards from…” gives us the occasion to receive some news from across the world, in sound and images. Short and spontaneous, it sometimes a question, sometimes an answer, an impression that is also an invitation.
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Filmer me terrifie. D’abord, préparer son sac : y glisser de l’eau, des lunettes de soleil, son passeport, un carnet et puis se redresser. Fixer les appareils disposés en ligne sur la table, se laisser envahir par l’hésitation, la crainte de ne pas avoir avec soi le bon appareil quand l’image se présentera.
Choisir et se mettre en quête, déposer son regard sur chaque recoin de cette ville dont on ignore tout mais dont on attend pourtant qu’elle donne une réponse à la question qui hante : « d’où viens-tu ? ».
Filmer me terrifie parce qu’il s’agit de diriger sa caméra, de définir un cadre où il doit se passer quelque chose, où même le rien doit prendre du sens. Mais souvent, les images sont muettes, peu importe la caméra glissée dans le sac. Aujourd’hui, le village refuse de se dévoiler.
Nous montons sur le toit, je suis exténué par la collection d’images vides qui habitent ma carte SD. Tu me tends une cigarette, je me penche sur la rue qu’éclaire un lampadaire capricieux. Dans un dernier sursaut, je réunis ce qu’il me reste d’espoir, appuie une ultime fois sur REC. Un enfant joue sous le regard de son père et soudainement, entre les bourrasques de vent, l’appel à la prière retentit. Nous nous taisons, de plus en plus. Dans le silence de Seriana, ta ville et peut-être la mienne aussi, nos regards oscillent de la scène à son écho sur l’écran LCD. Nous comprenons au rythme du Adhan, qu’il se passe enfin quelque chose, là où, la rencontre des banalités charge le vide de sens. Filmer me terrifie.