Dans l’œil du collectionneur n° 4:Arrivée du Lady Grey à Québec avec les victimes du naufrage de l’Empress of Ireland (Pathé, 1914)
Plus près du cabinet de curiosités que du panthéon, la série Dans l‘œil du collectionneur de Zoom Out propose des films hors normes dénichés en dehors des grandes archives et cinémathèques par nos collaborateurs et collaboratrices.
More of a cabinet of curiosities than a pantheon, Zoom Out’s Dans l‘œil du collectionneur presents outlandish films that have been found outside of official archives and cinematheques by our collector-collaborators.
Une sélection de | Presented by Sébastien Hudon (La Bande vidéo) & Louis Pelletier (Université de Montréal et Cinémathèque québécoise)
Description (fr)
Le 29 mai 1914, le paquebot transatlantique Empress of Ireland, qui assure la liaison Québec-Liverpool pour le Canadian Pacific depuis 1906, est abordé aux petites heures du matin par le charbonnier Storstad au large de Pointe-au-Père. Il sombre en moins de quinze minutes, emportant avec lui 1 012 de ses 1 477 passagers et membres d’équipage. Les corps de plusieurs des victimes de cette catastrophe maritime, la plus meurtrière de l’histoire du Canada, seront embarqués à bord du Lady Grey et ramenés à Québec le 31 mai.
Le naufrage de l’Empress of Ireland survient alors que le cinéma, qui n’était quelques années plus tôt qu’une curiosité scientifique ou une attraction de foire, complète sa transformation en média de masse. Les nouvelles salles de cinéma apparues dans les villes présentent des films de fiction, mais aussi des journaux d’actualités filmées inspirés du premier des médias de masse, la presse quotidienne. Ces journaux d’actualités filmés sont produits par les plus grandes maisons de l’époque, dont Pathé et Gaumont, mais souvent tournés par des opérateurs de prises de vues indépendants – les stringers, dans le jargon de l’industrie – prêts à courir les événements et vendre leurs images au plus offrant.
Une histoire d’héroïsme cristallise l’attention du public dans les jours suivant le naufrage, celle de Robert Crellin et de Florence Barbour. Âgée d’à peine 8 ans, Florence avait été sauvée du naufrage par son parrain Robert, un mineur ayant soutenu la famille Barbour après le décès du père de la jeune fille dans un accident de travail en 1913. Robert devait épouser la mère de Florence à l’issue de la traversée. Les médias comme le public s’entichent de cette jeune fille dont la mère et la sœur ont péri dans le naufrage, et qui se retrouve dès lors orpheline, de même que de son sauveteur. L’opérateur Pathé captera Crellin réconfortant Florence devant le Château Frontenac.
Cette copie 35 mm d’époque tirée sur support safety diacétate provient d’un lot d’extraits de journaux d’actualités filmées acquis en 2020 dans un encan britannique. Ce segment fut distribué en juin 1914 dans une édition du Pathé’s Animated Gazette produit par la branche britannique de Pathé. L’identité de l’opérateur ayant tourné ces images demeure à ce jour inconnus. Le Montrélais Léo-Ernest Ouimet entretint des liens étroits avec Pathé entre 1914 et 1922, mais ce n’est qu’à l’automne 1914, soit plusieurs mois après le naufrage, que ce partenariat fut formalisé. Le travail de numérisation a été mené par Alexis Landriault (Main Film), et la postproduction dirigée par Olivier Godin.
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Description (en)
Early in the morning of May 29, 1914, the ocean liner Empress of Ireland, which had been operated by the Canadian Pacific on its Quebec City-Liverpool route since 1906, collided with the coaler Storstad. The Empress sank near Pointe-au-Père, Quebec, in less than fifteen minutes, taking with her 1,012 of her 1,477 passengers and crew members. This marine disaster remains to this day the deadliest in Canadian history. Many of the bodies retrieved from the St. Lawrence were loaded on the steamer Lady Grey and returned to Quebec City on May 31.
The sinking of the Empress of Ireland occurred as moving pictures, which had first been treated as a scientific novelty or fairground attraction, were transitioning to a new status: that of mass media. The new moving picture houses operating in most towns and cities screened fiction films, but also newsreels inspired by the era’s other mass media, newspapers. These newsreels were released by some of the industry’s leading producers, such as Pathé and Gaumont, but often made up of images shot by independent cameramen—stringers, in industry lingo—always ready to grab their camera and run to disaster sites.
An heroic act grabbed the attention of the public in the days following the disaster: the rescue of little Florence Barbour, who was only eight-year-old, by her godfather Robert Crellin, a miner. The latter had taken care of the Barbour family since the passing of Florence’s father the preceding year in a work accident, and was to wed Florence’s mother upon the group’s arrival in England. Crellin and Florence, who had lost her mother and sister in the shipwreck and was now an orphan, were granted extensive coverage in newspapers, and soon became the object of an immense wave of sympathy. Pathé’s cameraman caught Crellin comforting Florence in front of Chateau Frontenac.
This newsreel segment was digitized from an historical 35mm diacetate print part of a film lot acquired at a British auction in the summer of 2020. It had been sourced from a June 1914 issue of the newsreel produced by Pathé’s British branch, the Pathé’s Animated Gazette. The cinematographer has yet to be identified. Quebec film pioneer Léo-Ernest Ouimet was a close collaborator of Pathé between 1914 and 1922, but his partnership with the international Pathé network would only be formalized several months after the Empress of Ireland disaster. The film was digitized by Alexis Landriault (Main Film), and postproduction work was performed by Olivier Godin.